mercredi 5 juin 2013

A qui la faute ? d'après H. Toumanian


Il était une fois un homme très pauvre. Pourtant, Dieu sait qu'il n'était pas paresseux ; il travaillait, trimait, suait, mais rien n'y faisait. Il restait toujours pauvre.
Un jour de grand découragement, il décida d'aller trouver Dieu pour protester auprès de Lui de cette injustice dont il était victime et lui demander quand cesserait enfin cette malchance.
Il se mit en route.
Chemin faisant, il rencontra un loup.


 - Bonjour, maître voyageur ; où vas-tu ainsi ? demanda le loup.
- Je vais auprès de Dieu pour Lui ouvrir mon coeur, Lui faire le récit de mes malheurs et Lui demander conseil.
- S'il en est ainsi, j'ai un service à te demander dit le loup. Quand tu y seras, parle- Lui de moi ; dis-Lui  qu'un loup affamé court par monts et par vaux du matin au soir sans trouver de quoi se nourrir. Demande-Lui quand cessera mon martyr et pourquoi m'a-t-Il créé s'il me faut mourir de faim ?
- Je lui parlerai de toi promit l'homme et poursuivit son chemin.
Après quelque temps, il rencontra un fort belle jeune fille.


- Où vas-tu ainsi, maître voyageur ? demanda-t-elle.
- Je vais auprès de Dieu pour lui présenter une requête.
- Quand tu y seras, peux-tu Lui parler de moi aussi ? pria-t-elle. Dis-Lui qu'il est sur terre une jeune fille bien portante, riche, aussi belle qu'une autre, mais qui ne parvient pas à jouir de la vie ni à se  sentir heureuse : que doit-elle faire pour trouver le bonheur ?
- Sois tranquille, je Lui parlerai de toi aussi, promit le voyageur et il poursuivit son chemin.


Bientôt, il aperçut un arbre qui, bien que s'élevant au bord de l'eau, était complètement desséché.
- Où t'en vas-tu ainsi ? Demanda l'arbre.
- Je vais auprès de Dieu.
- Puisque c'est ainsi, entends ma prière : peux-tu lui parler de moi  et Lui dire que je ne comprends rien à mon sort ; j'ai grandi au bord de cette eau limpide, mais été comme hiver mes branches restent nues. Quand donc, moi aussi, aurais-je des feuilles vertes et brillantes comme en ont tous les autres arbres ?
- C'est promis, je Lui parlerai de ce qui te préoccupe.
Et il poursuivit son chemin.
Bien des jours et des nuits passèrent avant qu'il n'atteigne son but.
Il arriva enfin auprès de Dieu.
  
C'était un grand vieillard, à la barbe et aux cheveux blancs, qui était assis sur un énorme rocher.
- Bonjour dit le pauvre et s'immobilisa, impressionné, devant Lui.
- Bonjour répondit Dieu : que désires-tu ?
- Encouragé, le malheureux  s'enhardit : on dit que Tu es impartial, que tu ne favorises pas les uns en délaissant les autres. Cependant, bien que je travaille, m'épuise, mon sort est misérable. Malgré tous mes efforts, je reste  pauvre et n'arrive pas à manger à ma faim. Tandis que d'autres, qui ne se donnent pas autant de peine que moi, sont riches et mènent une vie tranquille. Où est l'égalité, la justice, dans tout ceci ?
- Va ! Je te donne la Chance. Désormais tu sera riche et heureux. Sache en profiter.
- J'ai encore à vous transmettre des demandes, Seigneur, reprit notre bonhomme, et soumit les requêtes du loup affamé, de la belle et malheureuse jeune fille et de l'arbre desséché.
Dieu donna les réponses appropriées à chacun des cas ; le bonhomme se confondit en remerciements et prit d'un coeur léger le chemin du retour.

Quand l'arbre l'aperçut il lui demanda :
- quel message as-tu pour moi ?
- Dieu dit qu'il y a de l'or enterré sous tes racines. Tant qu'il ne sera pas ôté, tes racines ne pourront pas te nourrir et tes branches resteront sans feuillage.
- Mais c'est parfait ! se réjouit l'arbre. Creuse donc et prends l'or ! Nous en aurons chacun bénéfice ; toi, tu seras riche et moi je me couvrirai enfin de belles feuilles vertes.
- Non, je n'ai pas le temps, je suis pressé ; Dieu m'a donné Chance, il faut que j'aille vite la trouver...
Et il s'éloigna à grands pas.

Puis, il rencontra la belle et malheureuse jeune fille, qui se précipita vers lui.
- Alors, quelles nouvelles m'apportes-tu ?
- Dieu m'a dit que pour trouver ton bonheur, il faut que tu rencontres un compagnon de vie et partages toutes tes joies et toutes tes peines avec lui.
- Puisque c'est ainsi, deviens pour moi ce compagnon, pria la jeune fille.
- Non, je n'en ai pas le temps, Dieu m'a donné la Chance ; il faut que j'aille la découvrir et en profiter dit notre homme en s'éloignant rapidement.

Le loup affamé l'attendait impatiemment au bord de la route. Dés qu'il l'aperçut, il courut vers lui :
- Alors, qu'a-t-Il dit ?
- Il me faut d'abord te raconter toutes les autres rencontres qui se sont produites après la nôtre : celles d'une jeune fille malheureuse, puis d'un arbre desséché et, finalement, les conseils de Dieu à leur intention.
Puis notre homme fit part également, au loup très attentif, chacune de ses réponses quant aux solutions à mettre en oeuvre :   
- Pour la jeune fille, la nécessité d'un compagnon - et la proposition que lui avait faite cette dernière d'être ce compagnon  - offre qu'il a déclinée car il manquait de temps ...
- Pour l'arbre desséché, la nécessité de creuser pour ôter l'or - et l'offre de l'arbre le priant de creuser la terre - ce qu'il a également refusé puisqu'il n'avait pas le temps  
et que la Chance l'attendait ailleurs ...
- Et pour moi, qu'a dit Dieu ? interroge le loup impatient
- Eh bien, Il a dit que tu devrais errer affamé jusqu'à ce que tu rencontres un imbécile que tu mangeras et qui apaisera ta faim.
- Où veux-tu que je trouve un plus grand imbécile que toi ? 
répondit le loup qui le dévora sur le champ.

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